photo de classe

Tranche de vie

Les années Amphi L'année Paris L'année Fusil Les Années Fourmiz Et depuis...

Les années Amphi

Première année
Après le bac, j'ai été admis à l'école de chimie de Toulouse. Je pensais "éprouvettes et cornues" mais en fait de chimie, c'était à 100% un tronc commun avec le DEUG "sciences des structures et de la matière" de l'université Paul Sabatier : des maths purs, des maths avec un alibi de physique, des maths avec un alibi de chimie, plus des radotages de maths tous alibis dans la dite école soi-disant de chimie. En conséquence de quoi, bien qu'étant admis en deuxième année de l'école, j'ai donné ma démission, afin de ne faire que la 2ème année de DEUG sans les radotages.

Deuxième année
J'ai eu la funeste idée de prendre les options "Mécanique" et "Thermodynamique". Je pensais "Moteurs" et "Frigos" mais cela s'est révélé "maths avec alibi de rouages" et "maths avec alibi de thermomètre". J'avais aussi pris l'option "Préparation aux concours" dont je ne m'abaisserai pas à lui donner un qualificatif.

J'ai donc raté haut la main mes examens de deuxième année, notamment parce qu'à l'épreuve de thermodynamique il fallait supposer que les moteurs de voiture fonctionnaient à l'air pur et sans rejets vers l'extérieur... Pas de carburant et pas de fumées d'échappement... Des experts se demandent comment supprimer la dépendance au pétrole et la pollution. Moi, je sais : il faut demander au taré qui avait rédigé le sujet de l'examen de thermodynamique de cette année là.

Je me suis présenté à la session de septembre plus par acquis de conscience que par espoir d'être admis. J'étais nul dans certaines matières pour cause d'une incompatibilité génétique avec la forme et le fond de ce qui m'était enseigné, le radotage n'y pouvait rien. Pour l'épreuve de soi-disant mécanique, le problème consistait en l'étude d'un "cône renversé posé sur un plan horizontal et animé d'un mouvement de rotation autour de son axe". J'avais passé l'âge de jouer à la toupie et savait que les gyroscopes étaient au point depuis l'invention des fusées V2 pendant la seconde guerre mondiale alors tout ce que m'a suggéré l'énoncé à propos de ce cône c'était que celui qui l'avait pondu en était un.
Cela n'avait plus guère d'importance parce que j'avais résolu d'abandonner l'option "Mécanique".

Seconde deuxième année
Fort de mon expérience de l'année passée, j'ai pris les options "Calcul Numérique" et "Histoire des sciences". Le Calcul Numérique n'a rien à voir avec les maths vu que les symboles qu'on y manipule ont pour but d'obtenir des résultats et non pas essentiellement des points aux examens. En ce qui concerne l'Histoire des Sciences, où y découvre que ceux qui ont inventé ce qui est enseigné ne l'ont pas du tout élaboré de la manière dont on l'apprend. Ceci explique en grande partie pourquoi on rencontre trop souvent des universitaires dont on voit, à la manière dont ils professent, qu'ils ne savent ni d'où vient ce qu'ils enseignent ni à quoi cela peut bien mener : ils n'ont jamais pris option "histoire des sciences".

Pour l'option "Préparation aux concours", j'ai été contraint de la conserver mais ne l'ai suivie que pour faire tourner en faire tourner en bourrique Riri et Gégé, deux enseignants, et plus particulièrement un dont la place eut été en isolement camisolé sous traitement psychotrope s'il n'avait pas trouvé à se caser à ce poste. Entre autres, il dictait la ponctuation, les retours à la ligne, les soulignements, les encadrements et la couleur du bic à utiliser... Cela donnait des trucs du genre :
"bic noir le champ magnétique deux points souligner en vert à la ligne bic rouge il s'exprime en fonction de l'intégrale Lambertienne cubique ouvrez la parenthèse sauf si le conducteur est en métal non-newtonien fermer la parenthèse à la ligne bic bleu le champs électrique deux points souligner en vert" etc...

Avec la complicité d'un camarade, nous avons réussi à lui faire péter les plombs, sans toutefois réussir à le faire interner (c'est mon seul regret en ce qui le concerne) sur un coup où nous avons découvert que nous n'étions manifestement pas les seuls à souhaiter le voir disjoncter !

Pour les cours de maths, j'ai benoîtement suivi le conseil d'"Inspecteur Harry", le professeur qui avait tout compris de la philosophie de ses ouailles. Dès le début de l'année il donnait le type de sujet qu'il allait poser à l'examen de fin d'année. Selon ses dires, il choisissait toujours le même depuis plusieurs années. Il indiquait alors que ceux qui souhaitaient seulement avoir l'examen pouvaient partir pour ne revenir que lorsqu'il traiterait le sujet concerné. Pour ma première deuxième année, je ne l'avais pas cru. J'avais cependant constaté lors de l'examen, et la mort dans l'âme d'avoir suivi l'ensemble des cours, qu'il avait tenu parole. Donc pour ma seconde deuxième année, j'ai suivi son conseil, n'assistant à ses cours que de loin en loin, afin de vernir ma culture générale. Je n'ai repris la corvée d'assiduité que pour le sujet capital. Bien m'en a pris puisqu'il a effectivement à nouveau posé le sujet sur lequel il s'était engagé.

Ajoutons à cela une once de système D et hop, j'ai eu mon DEUG.
Pour m'apercevoir que le domaine dans lequel j'étais comme un poisson dans l'eau n'avait à voir que de loin avec ce que j'avais étudié. Ce domaine, c'était cette technologie émergente qui devait en dix ans conquérir tous les secteurs d'activité, sauf qu'alors on parlait d'"Apeultou" et que c'était plus un passe-temps qu'un outil industriel : l'informatique.
J'ai donc passé un DUT d'informatique, en un an au lieu de deux grâce à mon DEUG, et en étant de plus rétribué dans le cadre de la formation continue.
Malgré deux diplômes en poche, dont celui d'informatique seul était suffisant pour me présenter sur le marché du travail, je constatais que la majeure partie des offres se faisaient dans le domaine de l'informatique de gestion. Je supposais qu'il était préférable de passer un diplôme dans le domaine plutôt que de foncer tête baissée dans un secteur qui alors recrutait à tour de bras. Je présentais ma candidature à diverses formations et fut admis dans une école privée Parisienne.

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L'année Paris

La seule réelle difficulté fut de trouver un logement. Heureusement, un de mes oncles connaissait un fonctionnaire Parisien originaire du Lot, grand débrouillard devant l'éternel et qui arrondissait ses fins de mois par des travaux de plomberie, son premier métier.
J'allais d'abord en pension chez des voisins à lui, retraités sans enfants, qui m'accueillirent comme leur fils, le temps de trouver un logement indépendant.

Cette année d'étude fut particulièrement profitable. Je n'avais pas réalisé à quel point je n'étais pas fait, mais alors pas du tout fait, pour l'informatique de gestion ! L'informatique scientifique, oui. L'informatique de gestion, non. Heureusement que je n'avais pas foncé droit vers un emploi d'informatique de gestion dès la sortie du DUT parce que c'eut été catastrophique...

Sachant désormais ce pourquoi je n'étais vraiment pas fait, et mon sursis militaire épuisé, je partais à l'armée.

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L'année Fusil (une seule, mais ce fut amplement suffisant, d'ailleurs, depuis, le service militaire a été supprimé...)

J'ai été comme prévu incorporé au 17ème Régiment d'artillerie, une unité d'artillerie anti-aérienne que j'avais choisie à l'issue de la préparation militaire de 15 jours qui m'avait donné droit, quelques années auparavant, à mon précieux sursis. J'avais porté mon choix sur cette unité car elle était basée sur la côte Atlantique, dans les Landes. Sauf qu'étant incorporé en décembre cela perdait beaucoup de son charme. D'autres charmes supposés ont brutalement fané à la lumière crue des réalités de la vie trouffione.

A l'issue des classes, j'ai été admis au peloton des élèves gradés qui débouche sur le grade de brigadier. J'ai terminé deuxième, donc effectivement nommé brigadier mais, en plus, qualifié dans le groupe des trois premiers destinés à incorporer le peloton des élèves sous-officiers pour devenir sergent.

C'était sans compter avec la logique militaire.

N'étant que fils de "bourgeois intellectuels" et non pas, comme l'était le neuvième, fils d'un obscur colonel Godrie pouvant donner des ordres au lieutenant-colonel Dratch qui commandait le régiment, je suis donc resté caporal (donc brigadier, vous suivez toujours ?). Avec la satisfaction de voir plus tard ma promotion de brigadier-chef à l'ancienneté refusée par le Colonel Dratch (qui lui par contre était monté en grade entre-temps...), pour cause de diverses insubordinations vis à vis de ma hiérarchie. Vu le coup qu'ils m'avaient fait il faut bien avouer que dès lors je ne considérais plus les galons que comme des graduations sur une échelle des nuisances dont il convenait seulement de me méfier.

Etant arrivé, en un mois de classes suivi d'un mois de peloton d'élève gradé, à la conclusion que j'en avais appris plus en 15 jours de préparation militaire que je n'en aprendrai jamais en un an de service militaire, je demandais mon affectation à l'encadrement des nouvelles recrues, histoire de ne pas trop m'ennuyer et d'avoir régulièrement du changement.

Deux promotions plus tard, ponctuées chacune d'une tentative de suicide au sein du groupe qui était à ma charge, je m'apercevais que les dites tentatives étaient statistiquement considérées comme normales. Et il m'était conseillé de la boucler à ce sujet. L'ayant ouvert sur les méthodes d'encadrement qu'il me fallait appliquer, je me voyais proposé une autre affectation.

Je choisissais l'atelier d'entretien des canons. Mon choix étonna : Quoi ? Comment ? Un intellectuel qui veut aller mettre les mains dans la graisse et le métal ?
Mais comme cela pouvait permettre de me caser pour le reste du temps que j'avais à faire, je fus casé là...

Une profonde inimitié avec un quintet de Basques avinés de mon contingent me valu d'être privé de la traditionnelle beuverie de veille de libération.
Bouh, ouh, je versais des larmes de crocodile de ne pouvoir ni me bourrer la gueule au cocktail Pastis/bière, ni participer au concours de celui qui vomit le plus loin ou le plus puant...

Sur les conseils des officiers, je passais ma dernière nuit dans l'aumonerie de l'église de la base (je comprend mieux Quasimodo depuis...), et c'est le débonnaire aumonier militaire qui, le dernier matin, m'a discrètement exfiltré dans sa 4L de service afin de me rendre à la vie civile loin des remugles de la troupe.

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Les Années Fourmiz

Le problème de trouver un emploi intéressant dans un endroit sympathique s'est alors posé, problème résolu en ne répondant qu'aux offres d'emplois intéressantes dans les endroits sympathiques. Je jetais mon dévolu sur la modélisation informatique 3D, domaine dont l'essor me semblait assuré, (la gestion, non merci...) et sur Toulouse (Paris, non merci...). C'est ainsi que j'ai été embauché dans une société Toulousaine produisant des images de synthèse pour la simulation.

Le jour de la signature de mon contrat, j'ai eu la surprise de retrouver là un de mes anciens camarade de fac ayant peu ou prou les mêmes diplômes que moi. Ce qui m'a permis de savoir à quel salaire il était embauché, à savoir le même que celui que l'on me proposait.
Le travail me plaisait, j'y excellais et tout fut au mieux pendant les neufs années qui suivirent.

Mais un beau matin je levais le nez de sur mon clavier car les outils développés en interne, et les méthodes de travail associées, étaient devenus peu à peu obsolètes.

Las de précher dans le désert et de compenser l'incurie de mes chefs par des trésors d'imagination pour leur permettre d'être mieux payés que moi alors qu'ils s'ingéniaient à me mettre des batons dans les roues, je ruais dans les brancards.

Elu délégué du personnel puis secrétaire du comité d'entreprise et investi délégué syndical par le pire de tous les syndicats il ne me fallait qu'un an pour tramer une mutinerie genre Bounty, avec moi dans le rôle de Fletcher (mais sans mutinés...). La galère cependant voguait toujours au gré du vent et des courants, droit vers les récifs qu'il me semblait être le seul à voir.

Et puis soudainement il y eu un grand choc sans que j'ai rien vu venir : convoqué un lundi à 16h50 je me voyais signifié mon expulsion avec interdiction de remettre les pieds dans l'entreprise jusqu'à conclusion de la procédure et j'étais dehors à 17h00. En termes juridiques cela se nomme "licenciement avec mise à pied à titre conservatoire".
Fin du premier acte salarial.

Au bout de huit mois et deux rejets de mon licenciement par l'inspection du travail, le grand timonier soucieux de pouvoir continuer à guider paisiblement ses masses laborieuses me proposait de transiger pour que je me casse sans moufter. Après diverses tergiversations et moult négociations mesquines, je convenais de guerre lasse d'abandonner à leur triste sort tous les collègues qui m'avaient plus ou moins rapidement laissé choir au fil des mois.

Pour aller signer mon acte de rédition, je louais une limousine de gangster, avec chauffeur, une escort-girl et m'affublais d'un costume à noeud pap', histoire que mes collègues comprennent que j'avais vécu une expérience humainement enrichissante. Pas un ne tilta, leur conclusion collégiale étant, je l'appris plus tard, que soit j'allais à mon mariage soit que j'étais devenu fou. (entre nous soit dit, je ne vois pas très bien en quoi ils voyaient là deux versions différentes)

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Et depuis...

L'année suivante, l'entreprise à bout de souffle ne pouvait pas verser le dernier mois de salaire. Les démissions se mirent à fleurir. Un an plus tard, les rats les plus rapides ayant quitté le navire, un requin de la place de Toulouse ne faisait qu'une bouchée de ceux qui restaient puis récompensait certains rescapés, dont notamment l'âme damnée du timonier, en les virant.
Quelle tristesse...

Actuellement, à l'instar des dragons, je suis confortablement assis sur mon tas d'expérience-de-salarié-méchamment-syndiqué. De temps à autre j'exporte une 2CV aux USA afin de mettre un peu de caviar dans mon foie gras. Ces croquignolesques automobiles sont un hobby que j'arrive à faire partager à nos cousins du nouveau monde par l'intermédiaire du site internet que j'ai créé à cet effet.

Toutes les bonnes choses ayant une fin, j'ai suivi le conseil de mon mentor, Derek Walkin, un homme d'affaire américain francophile, amateur d'automobiles d'exceptions (c'est par cette entremise que j'ai fait sa connaissance) en lui achetant la licence d'un produit qui devrait apporter une petite révolution dans le domaine de l'immobilier par internet (en sus d'avoir sérieusement grignoté mon tas d'expérience de dragon...)

Mais pour l'instant j'ai choisi l'opportunité que l'on m'a offerte d'explorer le monde politique pendant quelques temps, ce sera de toute façon toujours une expérience utile par la suite.

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