(Journal « La Dépêche du Midi » Lot)
Régionale UNE - Jeudi 17 septembre 1964
DANS la chaleur torride da cette matinée de dimanche, le Lot se tordait lentement entre ses deux rangées d'arbres. Après avoir cahoté au rythme des secousses du sentier, le camp de base des spéléologues m'a accueilli. Soigneusement dissimulé dans une clairière, il était le dermier havre de fraîcheur que j'espérais rencontrer.
Mes appels ont troublé le silence impressionnant de ces lieux. Une silhouette chancelante s'est avancée hors de la tente. Claude Beffara, encore endormi, vient à ma rencontre. Déjà, la veille, M. Beffara m'avait piloté et m'avait présenté le terrain.
Le camp, installé dans une clairière, au pied d'une imposante falaise, se trouve à un jet de pierre de l'entrée du gouffre. Située au centre du bassin de recueillement des eaux d'un moulin désaffecté, cette entrée semble pouvoir laisser passer un homme debout.
Le patron de l'expédition est'bien connu des Cadurciens. Chacun connaît la passion de M. Guy Astruc pour la spéléo. C'est lui qui a mis sur pied et réglé tous les détails de ces trois jours de descente. Avec lui, M. Gabriel Maury, Jacques Deschamps, M. et Mme Jean-Claude Bonnefoy, du groupe de Montauban, José Encinas, Louis Roques, Gilbert Combet, Claude Beffara, Marie-Thérèse Maury et MM. Bourgeois père et fils.
Le côté international de l'expédition était apporté par la présence de trois Anglais qui, au dernier moment, se sont joints au groupe initial. Ils voulaient faire la connaissance de grouffres de notre région; ils ont eu la chance de pouvoir participer à cette reconnaissance. La conversation avec ces trois jeunes gens fut très brève puisque eux ne parlaient que l'anglais et nous le français, les deux langues n'ayant que très peu de points communs.
Le travail que s'était imposé les spéléologues consistait à vider un syphon par un système de pompage, pour ensuite procéder au relevé topographique des salles et cheminées qui se trouvaient au-delà du plan d'eau. Une première reconnaissance avait été effectuée, quelques années auparavant, par l'inventeur de la grotte : M. Fantagie.
Les deux équipes -- Cahors d'une part et Montauban de l'autre -- ont uni leurs efforts. Les Montalbanals, grands spécialistes du pompage, se sont confirmés comme les plus avertis en cette matière. C'est dans cette difficile technique l'un des groupes de France les plus aptes à résoudre les multiples problèmes que pose l'établissement d'un réseau d'assèchement de syphon ou de réserve d'eau.
En faisant appel à eux, M. Astruc les a, bien sûr, convié à participer à l'expédition.
Le pompage du syphon nécessitait près de deux cents mètres de canalisations. Là, il convient d'adresser aux cultivateurs de Saint-Géry des remerciements spéciaux puisqu'ils ont, sans hésitations, prêté leur matériel aux spéléologues, malgré la période de sécheresse. En outre, pour alimenter le moteur électrique de la pompe il fallait poser en travers du Lot un câble électrique. Cette pose a été facilitée par M. Decremps qui mit, à la disposition du groupe un de ses bateaux. L'aide de M. Decremps est encore plus importante quand on sait qu'il a prêté un compresseur et les marteaux-piqueurs nécessaires pour faire sauter une voûte, ce qui permettrait pour les expéditions suivantes de ne plus avoir le souci de pompage du syphon.
A tout ce matériel, il faut ajouter le matériel individuel :
lampes, équipements, cordes, échelles, soit au total plus d'une tonne que les spéléologues ont dû amener à
leur camp de base.
Le plan de travail a été établi soigneusement pour ces trois jours, chacun avait sa tâche précise.
Samedi, un premier groupe, sous la direction de M. Gabriel Maury, devait acheminer le matériel lourd, installer le camp, effectuer la mise en place du câble d'alimentation, la mise en place de la ligne téléphonique et la mise en place du système de pompage.
Arrivés à 9 heures le matin, tout le programme de travail a été rempli en douze heures, puisque le premier coup de pompe a été donné le soir vers 21 h. 30.
Devant l'efficacité du pompage -- à 3 h. 30 Claude Beffara, qui était de veille, signalait que le syphon était vide -- il fut décidée de couper la pompe et de recommencer le lendemain matin.
Le dimanche matin était donc pris par le pompage de l'eau du syphon. A midi, une première équipe, composée de Astruc, Deschamps, Roques et Bonnefoy, effectuait une première descente. Quatre heures de travail pour faire le relevé topographique exact des lieux pour étudier les possibilités d'exploration, et vers 16 heures toute l'équipe, à l'exception d'un ou deux membres de garde auprès de la pompe, devait effectuer une exploration.
La journée de lundi était réservée pour le démontage du camp.
Bientôt sera fait le bilan spéléologique de l'expédition, mais la première leçon qu'il convient de retirer de ces trois jours, c'est la parfaite entente entre les deux groupes spéléologiques de Cahors et de Montauban et le travail efficace de tous ceux qui ont pris part à cette expédition.
Déjà ce premier bilan satisfait non seulement le chef de l'expédition, M. Guy Astruc, mais tous les membres des deux clubs.
A.-A. ROUEDE.
![]() Une vue générale du camp de base : canots pneumatiques, cordes, compresseur... même du linge qui sèche, accroché aux branches. |
![]() Une tasse originale pour le chef de l'expédition. Guy ASTRUC, qui boit son café avant de redescendre. |
![]() Claude BAFFARA, qui a travaillé une grande partie de la nuit, se repose en regardant ses camarades Louis ROQUES (debout) et José ENCINAS (accroupi), qui se préparent à descendre. |
Numérisation de l'article par : Sylvain ROQUES